Boris Godunov
New National Theatre Tokyo

Boris Godounov

Moussorgski
Ce spectacle n'est plus disponible en vidéo à la demande, mais vous pouvez encore profiter des contenus annexes à la production.
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Chanté en
russe
Sous-titres en
anglais
japonais
russe

Comme Macbeth de Shakespeare, Boris Godounov est capable de commettre un meurtre dans sa quête de pouvoir. Lorsque ses adversaires politiques se servent d’un soi-disant descendant du tsar précédent - le Prétendant - pour orchestrer un coup d'État, Godounov, tourmenté par les remords, est persuadé qu’il s’agit de la réincarnation de sa victime qui, telle un ange vengeur, vient lui ôter la vie.

Adapté d’une pièce d'Alexandre Pouchkine sur le véritable Boris Godounov, l'opéra retrace la vie du régent russe pendant la période de trouble de la fin du 16ème siècle, de son couronnement à sa mort. Cette sombre tragédie évoque les cris d'une nation, les intrigues de ceux qui détiennent le pouvoir et l'angoisse de Boris lui-même. La musique, réolument moderne et riche d'harmonies innovantes basées sur des chansons populaires russes et la musique religieuse orthodoxe russe, est considérée comme le summum de l'opéra russe. Cette nouvelle production de Tokyo est dirigée par Kazushi Ono, directeur artistique du New National Theatre, et mise en scène par Mariusz Treliński, directeur artistique du Polish National Opera, coproducteur de ce spectacle. Après une brillante carrière au cinéma, le travail de Treliński à l'opéra fait ressortir la beauté essentielle de la musique dans une esthétique théâtrale contemporaine. Avec une excellente distribution, le drame se déploie autour de la chute de Boris Godounov, acculé par ses propres actions. Cette production combine la version originale de 1869 et la version révisée de 1872.

DISTRIBUTION

Boris Godounov
Guido Jentjens
Fiodor*
Eiko Koizumi
Xenia
Kanae Kushima
La nourrice*
Mika Kaneko
Le prince Vassili Chouïski
Arnold Bezuyen
Andreï Chtchelkalov
Naoyuki Akitani
Pimène
Goderdzi Janelidze
Grigori, se faisant passer pour Dmitri
Kazuma Kudo
Varlaam
Teppei Kono
Missaïl
Hideyuki Aochi
L’aubergiste
Kasumi Shimizu
L'innocent (voix)
Tetsutaro Shimizu
Nikitich
Toshiaki Komada
Mityukha
Hiroaki Otsuka
Un boyard
Takayuki Hamamatsu
Fyodor - L'innocent (rôle muet)
Justyna Wasilewska
Chœurs
New National Theatre Chorus
Chœur des enfants
TOKYO FM Boys Choir
Orchestre
Tokyo Metropolitan Symphony Orchestra
...
Musique
Modest Mussorgsky
Texte
Modest Mussorgsky after Boris Godunov by Aleksandr Pushkin
Direction musicale
Kazushi Ono
Mise en scène
Mariusz Treliński
Décors
Boris Kudlička
Costumes
Wojciech Dziedzic
Lumières
Marc Heinz
Dramaturgie
Marcin Cecko
Conception vidéo
Bartek Macias
Chorégraphie
Maćko Prusak
Maquillage et coiffures
Waldemar Pokromski
Chef des Chœurs
Kyohei Tomihira
Chef du Chœur des enfants
Yuka Hayashi
Kunie Ito
...
*Ces deux rôles sont représentés comme les amis de Xenia dans cette production.
 
Coproduction avec Teatr Wielki - Polish National Opera.

VIDÉO 

Trailer

Un avant-goût de Boris Godounov

Un pouvoir absolu paralysé par la culpabilité.


 

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Extrait

I can hardly breathe!

Boris Godounov (Guido Jentjens) a éliminé son rival, le Tsarévitch Dmitri, pour accéder au pouvoir. Cinq ans plus tard, un usurpateur se fait passer pour le prétendant légal au trône et le peuple découvre les crimes de Boris. Dans cette scène de folie – l'une des plus célèbres du répertoire lyrique –, Godounov croit voir le fantôme de Dmitri, implore le pardon de Dieu et s'effondre.

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En coulisses

Mariusz Treliński (metteur en scène)

« Pour moi, Boris Godounov est principalement une histoire sur l'humanité, et notre interprétation est une étude de sa folie. L'un des points cruciaux est sa relation avec son fils, la matérialisation de sa culpabilité. »

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L'HISTOIRE


Prologue

Peu de temps avant le couronnement, Godounov passe son temps au chevet de son fils paralysé, Fiodor. C’est éprouvant pour tous les deux. Lorsque Godounov n'est pas avec son fils, il s'effondre mentalement. L'esprit terrifié du souverain greffe des visions subjectives aux événements objectifs. Avec son personnel, Shchelkalov, Shuysky, sa fille Xenia et d'autres, il est impitoyable et agressif. Il ne se laisse pas aider. L'état-major explique à la foule l'indisposition temporaire du souverain, mais derrière son dos, tout le monde, sauf Xenia, se moque de lui. Avant d'accepter la couronne, Godounov rencontre les hiérarques. Pimène, le plus haut hiérarque, est un adversaire acharné du souverain. Les deux jouent le jeu de la courtoisie diplomatique, Godounov se force et embrasse l'anneau de Pimène. Quelques instants plus tard, Godounov dans sa chambre a une vision mystérieuse. Nous voyons Ouglitch, un lieu où le successeur au trône de la dynastie précédente, Tsarévitch, est mort. Le discours de Godounov lors du couronnement captive le peuple. Boris espère sincèrement mettre fin à la période d'anarchie et de chaos dans laquelle le pays est plongé.

Acte I

Six ans plus tard. Pimène soumet ses moines à la propagande. Le but de la secte de Pimène est d'ôter le pouvoir à Godounov. Il fait croire à l'un de ses adeptes, Grigori, qu'il est la réincarnation du Tsarévitch, assassiné par les gens de Godounov. Grigori devient le Prétendant. En route vers Godounov, le Prétendant et deux moines s'arrêtent dans un buvette de province. L'entrée d'une escouade brutale de forces spéciales à la recherche du Prétendant se termine en massacre.

Acte II

Godounov est épuisé par des années de règne. En voyant sa fille en deuil de son fiancé, il a le sentiment non seulement de s’être perdu lui-même, mais d’avoir aussi perdu toute sa famille. Fiodor, se vantant de ses premiers pas aidé de béquilles, partage sa vision de la manière dont il gouvernera à l'avenir. Godounov, cachant ses larmes, acquiesce en hochant la tête. Un des proches collaborateurs de Godounov, Chouïski, sent la faiblesse du Tsar. Il le manipule. Ils se souviennent des événements d'Ouglitch. Godounov a une vision d'une figure angélique de la vengeance : le Tsarevitch, mort, en armure brillante, ressemblant au Prétendant.

Acte III

Les parlementaires rebelles croient à la propagande du Prétendant. La couverture médiatique le montre comme un ange de la purification. Le Parlement, dans l'euphorie, se retourne contre Godounov. Godounov fait un autre cauchemar. Les enfants assassinés d'Ouglitch l'entourent. Son fils Fiodor le regarde avec haine et reproche. Il l'accuse du crime et l'étrangle. Il y a quelque chose de terrifiant et, en même temps, de mystique dans le vertige de son corps malade. Il est l’incarnation moderne d'une figure clé de la culture russe, Yurodivy, un saint fou à travers lequel Dieu parlerait. En réalité, Fiodor a une forte fièvre et délire. Godounov et son personnel veillent sur lui. Fiodor continue l'accusation de Yurodivy, affirmant que Godounov a massacré le Tsarévitch.

Acte IV

Les travaux du parlement ressemblent de plus en plus à une parodie, les parlementaires changent d'avis et sont incapables de se mettre d’accord. La situation change lorsque Godounov apparaît. Il n’est que l’ombre de lui-même, un homme au bord de la folie, éprouvé par la culpabilité. Chouïski se moque de lui devant tout le monde. Pimène parle d'un spectre du Tsarévitch assassiné, qui, comme une relique, guérit les gens. Il provoque Godounov qui, dans un accès de folie, confesse ses crimes. Pimène triomphe. Le Prétendant entre dans la pièce avec une armée de moines-loups et assassine brutalement son maître et professeur, Pimène. Les parlementaires paniquent. Le Prétendant blesse Godounov et l'humilie en lui piétinant le visage. Godounov supplie qu'on lui accorde un moment seul avec son fils.

Godounov annonce à son fils sa mort imminente et s'excuse auprès de lui. Le garçon paralysé ne comprend pas bien. Voulant épargner à son fils la brutalité inhumaine du Prétendant, il tue lui-même Fiodor.

Finale

L’ensemble du parlement est exécuté. Le dernier meurtre est celui de Godounov. À l'étage supérieur, nous voyons le Prétendant, qui se présente comme un saint sauveur. Il boit le sang de Godounov dans le calice du Tsar, le lève en signe de toast et se proclame nouveau Tsar. La Bête est sur le trône.

 

Argument par Marcin Cecko, dramaturge.

EN PROFONDEUR

La culpabilité de Godounov 

Le dramaturge Martin Cecko à propos de Boris Godounov
Chaque fois que nous nous lançons dans l'interprétation d'un opéra avec le metteur en scène Mariusz Treliński, nous commençons par la recherche de ce qui est vrai et universel dans l'œuvre, c'est-à-dire de ce qui est contemporain. Mariusz a besoin de comprendre profondément les personnages et leurs motivations. Il a l'intuition d'un réalisateur de film qui veut ressentir un personnage, définir ce qui est en lui, son noyau, son mystère, et extraire sa vérité émotionnelle. Pour y parvenir, nous devons remettre en question les stéréotypes et les clichés qui se sont accumulés autour de pièces célèbres. Nous avons commencé notre travail sur l'opéra de Moussorgski en analysant l'arc principal de Godounov : sa culpabilité. Dans l'original, elle est si grande qu'elle le conduit directement à la mort. Pour un artiste en quête de réalisme psychologique, un tel événement soulève de nombreuses questions. Cela semble trop magique, de l'ordre du mythe. Compte tenu de la position de Boris, de sa détermination, de sa ruse et de son expérience politique, qu'a-t-il bien pu se passer en lui pour que son corps décide, contre son gré, de mourir de lui-même de peur et de remords ? Même si nous savions que nous ne voulions pas nous référer aux productions à thème d'époque qui font la réputation des théâtres russes, nous avons effectué des recherches historiques approfondies.

En tant que personnage historique, Godounov est passé du statut de simple noble à celui de bras droit d'Ivan le Terrible grâce à une carrière au service de ce que l'on appelle l'Oprichina, la garde personnelle du cruel tsar Ivan. Cette petite armée serait responsable de l'assassinat de quelque 100 000 personnes, des ennemis du souverain, mais aussi des civils, parfois des villes tatares entières. Un long service dans une telle organisation, dans un escadron d'assassins, ne peut manquer de laisser des séquelles psychiques. Nous avons commencé à voir chez Godounov un traumatisme de longue date, qui a mûri et s'est révélé juste avant le moment de l'action de l'opéra. Il s'agit d'un syndrome connu sous le nom de syndrome de stress post-traumatique (SSPT), qui touche les soldats vétérans. Les symptômes de ce syndrome comprennent des hallucinations, de l'agressivité, des changements d'humeur et de la paranoïa. Malgré ses efforts, une personne atteinte de ce syndrome ne peut pas faire la différence entre ses propres fantasmes et la vérité. Voici le Godounov que nous recherchions : complexe, fracturé, multidimensionnel. C'est ce qui a donné le ton et le style de tout le spectacle. Le mythe antique ou la magie shakespearienne prennent pied dans la vérité psychologique et la biographie du héros, dont nous ne voyons qu'un fragment de vie sur scène. La scénographie suit l'idée de Godounov, qui est le sujet de l'histoire : les pièces mobiles forment un labyrinthe de son esprit. Les événements apparaissent à Godounov et, après un certain temps, ils s'éparpillent comme des souvenirs flous. Il ne sait pas si les gens qui l'appellent à prendre la couronne sont nés d’un rêve ou s’ils sont bien la foule à l'extérieur du siège du gouvernement. La scène du meurtre à Uglich se matérialise littéralement en s'approchant de lui.

La relation de Godounov avec son fils Fiodor est essentielle. Fiodor est un enfant malade. Godounov s'en veut : ses actions, comme un châtiment fatidique, ont causé l'infirmité de son fils. Dans les moments où Godounov s'occupe de lui, il montre son visage humain. Il s'agit toutefois d'une relation ambivalente. Dans cette histoire, le pouvoir vient de l'héritage. Godounov sait qu'il n'a pas de descendant qui prendra le trône après lui. En plus de sa maladie, Fiodor semble posséder des pouvoirs psychiques. Ici, nous avons combiné le rôle de Fiodor avec le personnage de l’innocent (Yuródivïy), le fou sacré, qui n'apparaît que dans une seule scène de l'opéra. Yuródivïy, une figure particulière de la culture russe qui pouvait dire n'importe quoi en toute impunité, même au chef de l'État, accuse Godounov de meurtre. C'est un tournant dans l'histoire. À partir de ce moment, Godounov s'effondre. Il cesse de se battre. C'est d'autant plus douloureux pour lui que l'accusation tombe de la bouche de son propre fils, à la fois victime et bourreau.

L'adversaire le plus dangereux de Godounov n'est cependant ni son fils, ni le remords qui l'illusionne, mais le fanatique Pimène et son élève qu'il désigne comme l'héritier du trône - Grigori, qui devient le Prétendant. C'est le deuxième personnage de l'opéra à vouloir accéder au pouvoir, même si cela implique de tuer. Élevé par la propagande de Pimène et victime d’un lavage de cerveau, Grigori est convaincu qu'il est la réincarnation du Tsarévitch assassiné. Il était très important pour nous de montrer ce personnage comme extrêmement cruel. Deux hommes situés de part et d'autre de la barricade, Pimène et Godounov, provoquent par leurs actions un mal encore plus grand. Alors que Godounov a des remords, le Prétendant n'en a aucun : il tire satisfaction du meurtre. C'est un personnage narcissique qui, dans le final, se révèle comme une bête pure. Il veut voir le monde plonger dans le chaos. Le Prétendant devient pour nous le symbole d'une période de troubles dont nous pourrions être témoins aujourd'hui, causée par l'irresponsabilité des mauvaises personnes au pouvoir.